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Précieuse sensibilité

Je pense qu’énormément d’êtres humains sont sensibles et ont un grand coeur. Malgré tout ce que l’on peut voir, entendre, lire, je crois fermement à cela.

Mais je pense aussi que cette sensibilité, si belle et si précieuse, celle qui nous guide et qu’on pourrait aussi appeler «intuition», peut être très discrète et se cacher en un éclair en cas de «danger». Se cacher si profondément en nous, que dans certains cas nous n’arrivons même plus à la retrouver. Nous devenons alors des êtres aigris, en colère, tristes, méfiants et manipulables à souhait. Et c’est un cercle vicieux : plus nous nous éloignons d’elle, plus nous nous enfonçons dans le «côté sombre» de ce qui peut exister sur Terre, et plus nous nous éloignons de nous-mêmes.

Mais pourquoi un tel éloignement ?

La vie est faite d’expériences, que nous jugeons bonnes ou mauvaises. Enormément de paramètres (personnalité, éducation, vécu, croyances…) vont déterminer la façon dont nous allons vivre ces événements. Un même événement ne sera pas vécu de la même façon par 2 personnes en présence.

Ainsi, il arrive qu’une ou plusieurs expérience(s) mal vécu(e)s nous traumatise(nt), que l’on sent rende compte ou pas. Nous pouvons choisir de nous fermer complètement, de rejeter nos sentiments et de vivre en contrôlant tout, pour éviter de souffrir encore une fois.
Mais ce rejet de nous-même peut aussi se faire à notre insu…

Mon expérience personnelle

Je connais bien ce dernier point. Etant moi-même une personne très sensible, il m’arrivait très souvent, quand j’étais petite, d’être marquée par des «petites choses». Petites choses qui étaient énormes pour moi, et quand je voyais les autres personnes autour de moi ne pas les remarquer (alors que moi elles me marquaient pendant des mois voire des années parfois !), je ne comprenais pas et j’en souffrais beaucoup. Je souffrais également car j’avais honte d’être touchée à ce point et me sentais totalement incomprise.

J’ai «trainé» cette sensibilité très handicapante des années durant, me demandant sans cesse si j’étais «normale» et plusieurs fois j’espérais de tout coeur qu’elle parte et que je sois «comme tout le monde».

Mon vœu s’est exaucé en 2018 mais cela a été la pire expérience de ma vie.

Je fais partie des survivants de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice, expérience terrible au cours de laquelle j’ai vu l’horreur. Les semaines qui ont suivi, j’ai choisi volontairement de ne plus prêter attention à cet événement, faisant comme s’il n’avait pas existé.

C’est en 2018 qu’il m’est revenu puissance 1000, se matérialisant par un stress post-traumatique. Sans donner tous les détails de l’horreur absolue que j’ai vécu et ressenti, une chose terriblement marquante a été la perte quasi totale de ma sensibilité. Je ne ressentais plus RIEN, je n’arrivais plus à pleurer ou à rire, ni même à parler. J’étais bloquée dans un infini présent mort, où les secondes, minutes, heures, jours, semaines puis mois, passaient avec la même saveur. Ce supplice me fit regretter amèrement les moments dans mon passé où je rêvais de ne plus avoir autant de sensibilité, où je me reniais, en fait.

Grâce à l’aide de certaines personnes de mon entourage qui étaient au courant et à moi-même qui voulais absolument sortir de là, je me suis battue jour après jour pour retrouver ma sensibilité, retrouver ce qui me faisais vibrer, jour après jour, autant en bien, qu’en mal. Car ma sensibilité me fit également passer de très mauvais moments, mais n’est-ce pas cela aussi, vivre ? Pour ma part, je préfère la vivre à 100% pour le meilleur et pour le pire, plutôt que de la perdre et être une «morte-vivante».

Et j’ai fini par y arriver ! Notre sensibilité est toujours là si on le désire, enfouit peut-être, peut- être même très profondément en nous, mais il suffit de la chercher sans relâche, de ne jamais abandonner et de l’aider à ressortir.

Mise en pratique

Voici un petit exercice qu’il est possible de faire quotidiennement afin de se reconnecter à sa sensibilité, notamment dans les moments où l’on se laisse happer par l’agitation (extérieure ou intérieure) :
Trouve un moment dans la journée pour repenser à un souvenir pendant lequel tu étais pleinement heureuse. Plonge-toi complètement dans ce souvenir : remet-toi entièrement dans le contexte de la situation (donc revois le paysage, les personnes présentes, les odeurs peut-être, les voix des personnes etc) puis ressens pleinement la sensation que tu ressentais à ce moment là, comme si tu avais fait un bon dans le temps et que tu t’étais retrouvée à nouveau dans cette situation. Il est primordial de s’y replonger complètement et surtout de ressentir.

→ cet état va t’aider à intégrer la sensation de plénitude en toi, et si cet exercice est pratiqué tous les jours avec différents souvenirs (la sensation de plénitude pouvant prendre différentes formes) cela va te permettre de la ressentir puissamment dans chacune de tes journées.
Puis, en revenant dans l’instant présent, il te suffit de garder en toi cette sensation et de la faire perdurer le plus longtemps possible.

En faisant cela chaque jour, tu renoues de plus en plus avec ta sensibilité et ton bien-être. Tu peux ensuite transposer ce ressenti aux situations du moment présent et rechercher autour de toi quels petits (ou grands) bonheurs tu peux intégrer, en plus, en toi.

Julie Serfaty

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